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Révolution numérique : Les opportunités à saisir par le secteur bancaire africain

Par Nel Charbel KOFFI

Le secteur bancaire africain est en pleine transformation sous l’impulsion de la révolution numérique. Ce bouleversement technologique a redéfini les interactions entre les banques, leurs clients et les acteurs économiques, tout en ouvrant des opportunités inédites et en soulevant des défis significatifs. Cette mutation est essentielle dans un continent où l’inclusion financière reste une priorité. Dans cette analyse, impact business met à en lumière certaines de ces opportunités et les défis de cette révolution numérique du secteur bancaire africain.

L’Afrique est aujourd’hui l’un des marchés les plus dynamiques en matière de technologie mobile. Selon un rapport de la GSMA, le continent comptait 621 millions de connexions mobiles en 2022. Cette pénétration a été un catalyseur pour la bancarisation via le numérique. Des solutions comme M-Pesa , pionnière au Kenya, ont démontré le potentiel du mobile money pour offrir des services bancaires de base à une population souvent exclue du système traditionnel. De nombreuses banques africaines, telles qu’Ecobank et UBA (United Bank for Africa), ont investi dans des plateformes numériques pour proposer des services de transfert, d’épargne et de crédit. Par exemple, en Côte d’Ivoire, Orange Bank Africa a lancé des comptes d’épargne rémunérés accessibles via mobile. En moins de deux ans, la banque a enregistré plus de 1 million de clients, selon son directeur général, Jean-Louis Menann-Kouamé.

Ainsi les opportunités offertes par la numérisation bancaire sont multiples. En premier on peut noter l’inclusion financière cumulée. En effet, la révolution numérique permet de surmonter les défis géographiques et infrastructurels. Grâce aux solutions mobiles, des populations rurales, souvent hors de portée des banques traditionnelles, accèdent désormais aux services financiers. Selon la Banque Mondiale, le taux de bancarisation en Afrique subsaharienne est passé de 23 % en 2011 à 43 % en 2021, une évolution largement attribuée à la finance numérique.

On note aussi la réduction des coûts opérationnels car les banques peuvent réduire les coûts en passant au numérique. Les agences traditionnelles cèdent peu à peu la place aux applications mobiles et aux plateformes en ligne, ce qui diminue  ainsi les frais généraux tout en augmentant la portée des services.

Selon Patrick Akinwuntan, directeur général d’Ecobank, « les solutions numériques permettent d’atteindre une rentabilité tout en améliorant l’accès aux services financiers pour des millions de personnes auparavant exclus. »

L’innovations dans les produits financiers représente également une mine d’opportunités puisque les outils numériques permettent de créer des produits adaptés aux besoins des Africains. Par exemple, des plateformes comme Paystack et Flutterwave, spécialisées dans les paiements en ligne, facilitent l’intégration des PME dans l’économie numérique.

Néanmoins tant qu’il reste à faire, le travail n’est pas finir car les défis à surmonter dans la numérisation bancaire n’en demeurent pas moindres. La fracture numérique, Cybersécurité et protection des données, Réglementation et cadre juridique, Résistance au changement, sont entre autres des points saillants qui méritent réflexions.

En effet, malgré les progrès, une partie significative de la population africaine reste exclue des services numériques en raison d’un accès limité à l’internet, au mobile ou à l’électricité. Dans certains pays, comme la République Démocratique du Congo (RDC), le taux de pénétration d’internet est inférieur à 20 %. Et avec l’essor du numérique, le risque de cyberattaques augmente chaque jour. Les banques africaines doivent investir massivement dans des infrastructures sécurisées. En 2023, une attaque ciblant une banque sud-africaine a entraîné des pertes estimées à 5 millions de dollars.

D’après Yinka Adedayo, spécialiste en cybersécurité : « Les institutions financières africaines doivent adopter des normes globales pour sécuriser les transactions, sinon elles risquent de perdre la confiance de leurs clients. »

De plus, le développement rapide des technologies a souvent devancé les réglementations. Les autorités africaines peinent à encadrer des innovations comme les cryptomonnaies ou les prêts numériques, créant un flou juridique qui freine parfois les investissements. Dans le même temps, certaines banques traditionnelles et leurs clients, notamment les personnes âgées, hésitant à adopter les nouvelles technologies. Des campagnes de sensibilisation et de formation sont nécessaires pour combler cet écart.

Le rôle des fintechs dans la transformation bancaire ?

Les fintechs jouent un rôle clé dans la révolution numérique en Afrique. Ces start-ups technologiques apportent des solutions rapides et innovantes, souvent mieux adaptées que les offres bancaires traditionnelles. Flutterwave, une fintech nigériane, a levé 250 millions de dollars en 2022 et est désormais valorisée à plus de 3 milliards de dollars. Elle permet aux PME de recevoir des paiements dans plus de 30 devises. Ainsi, au lieu de rivaliser, plusieurs banques optent pour des partenariats avec des fintechs. Par exemple, Standard Bank en Afrique du Sud collabore avec SnapScan pour proposer des paiements QR, une solution pratique pour les commerces de proximité.

Une chose est certaine, la révolution numérique dans le secteur bancaire africain est en marche. Elle représente une opportunité majeure pour le secteur bancaire africain et  permet d’inclure financièrement des millions de personnes, de moderniser les services et de stimuler l’économie. Cependant, pour exploiter pleinement ce potentiel, les banques et les gouvernements doivent relever ces nombreux défis afin d’y parvenir . Comme l’a souligné Vera Songwe, ancienne secrétaire exécutive de la CEA (Commission Économique pour l’Afrique) : « L’Afrique a une chance unique de remodeler son secteur financier grâce au numérique. Mais cela nécessite des politiques inclusives et des investissements stratégiques « .