Finance islamique : l’Afrique de l’Ouest parie sur les sukuks pour se développer
Par MLDIATTA

Le 10ᵉ Forum international sur la finance islamique de l’Afrique de l’Ouest (IFF West Africa 2025) se tiendra les 23 et 24 juin 2025 au King Fahd Palace de Dakar. Dans un contexte de pressions accrues sur les dettes souveraines et de saturation des bilans publics, les États africains n’ont d’autre choix que d’innover.
Le sukuk, obligation adossée à des actifs réels et conforme à la charia, s’impose peu à peu comme une solution de financement viable, éthique et résiliente.
La 10ᵉ édition du Forum international sur la finance islamique de l’Afrique de l’Ouest, plus grande rencontre en Afrique sur cette industrie, mettra cette année l’accent sur deux leviers puissants et éthiques : les sukuks souverains, pour financer des projets stratégiques d’infrastructure, et les instruments participatifs islamiques, pour stimuler l’accès au financement des PME, cœur battant de nos économies.
Lors de son intervention, le 16 avril 2025, à la deuxième édition des Rencontres de l’APSGI (l’Association Professionnelle des Sociétés de Gestion et d’Intermédiation de l’UEMOA), M. Mouhamadou Lamine Mbacke a mis en exergue le potentiel inexploité de la sous-région pour l’émission de sukuks en monnaie locale, afin de financer entre autres le secteur de l’immobilier dans l’UEMOA. Il a salué la volonté et les innovations de l’AMF-UEMOA (l’Autorité des Marchés Financiers de l’Union Monétaire Ouest Africaine), qui œuvre à l’émergence d’un marché des capitaux dédié aux sukuks pour mobiliser des investissements participatifs dans la réalisation de projets stratégiques et d’infrastructures pour nos pays.
M. Mbacke a insisté sur le fait que non seulement ces investissements participatifs (de type sukuk ou moucharakah) n’augmentent pas le ratio d’endettement — car ils peuvent être structurés comme des investissements directs — mais aussi, émis en monnaie locale, ils réduisent la pression sur l’endettement en devises.
Il a par ailleurs qualifié la structuration des sukuks ijara émis par le Sénégal ces dernières années d’inadaptée à notre économie. En effet, des pays comme le Sénégal et la Côte d’Ivoire ont un besoin important de financer des infrastructures ou des projets générateurs de revenus (autoroutes à péage, aéroports, centrales électriques, etc.), contrairement à des pays occidentaux comme le Luxembourg ou le Japon, qui ont structuré des sukuks ijara dans le but d’attirer les investisseurs islamiques, sans pour autant avoir le besoin de financer des actifs réels générateurs de revenus.
Le caractère participatif (investissement) et l’impact sur l’économie réelle des sukuks sont en parfaite adéquation avec les besoins des pays de l’UEMOA, tant pour combler leur gap en infrastructures que pour attirer des investissements directs conformes à la charia.
Le 10ᵉ anniversaire du Forum sur la Finance islamique de l’Afrique de l’Ouest (IFF West Africa 2025), qui se veut une méga édition, en partenariat avec la Banque islamique de développement et ayant pour pays hôte la Côte d’Ivoire, sera l’occasion de réunir les fonds d’investissement sharia compliant, les gouvernements et le secteur privé de l’UEMOA, ainsi que les meilleurs experts en la matière, afin de combler le retard de l’Afrique dans cette industrie. Celle-ci représente un volume d’actifs de plus de 4 000 milliards de dollars à travers le monde, avec un taux de croissance à deux chiffres, alors que le continent ne détient encore qu’une part inférieure à 5 % dans ces actifs.