Dr Fareed ARTHUR, coordonnateur national ZLECAf du Ghana : « Les perspectives du commerce intra-africain restent élevées et prometteuses »
Propos recueillis par YAO Noël

Dans l’interview qu’il a bien voulu accorder à Impact Business, le coordonnateur national de la ZLECAf du Ghana, Dr Fareed ARTHUR, tout en relevant les défis qui entravent encore le passage à l’échelle de la ZLECAF, dit sa foi dans les perspectives de la plus grande zone de libre-échange au monde.
Sept ans après le lancement de la ZLECAf à Kigali, le Ghana est-il satisfait des réalisations jusqu’à présent ?
Au niveau national, le Ghana a accompli des progrès louables depuis la signature de l’accord en 2018. Jusqu’à présent, nos efforts de mise en œuvre ont abouti à une approche considérée comme un modèle à reproduire à travers le continent. Parmi les avancées réalisées depuis la signature de l’accord figurent la création du bureau de coordination nationale de la ZLECAf au Ghana, l’élaboration d’une stratégie nationale, la participation à l’initiative commerciale guidée de la ZLECAf (GTI), qui a permis au Ghana et à sept autres pays de commencer à négocier dans le cadre de cet accord, les missions commerciales en Afrique de l’Est, qui ont abouti à des partenariats et ont permis à des entreprises ghanéennes de pénétrer ce marché et de négocier activement avec leurs homologues.
Voyons maintenant la situation à l’échelle panafricaine. Quelle est l’évolution depuis 2018 ?
À l’échelle continentale, 49 des 55 pays africains ont ratifié l’accord. Les négociations et l’adoption des protocoles en suspens constituent également des avancées notables. Ces étapes initiales fournissent un cadre et des directives pour la participation des États à la ZLECAf. Bien que le nombre de pays et de produits impliqués dans le GTI soit passé à 39 en juillet 2024, il reste encore beaucoup à faire pour garantir une meilleure préparation opérationnelle dans tous les pays participants.
À l’heure actuelle, le Ghana est-il satisfait du niveau du commerce intra-africain ?
Le commerce entre les pays africains demeure extrêmement faible. Cependant, les opportunités restent élevées et prometteuses.
Quelle est votre vision d’une circulation plus fluide des biens, des personnes et des services en Afrique ?
Parmi les objectifs à atteindre, nous devons viser des échanges transfrontaliers facilités avec peu ou pas de tarifs douaniers, la suppression des barrières non tarifaires, une meilleure facilitation du commerce le long du corridor Abidjan-Lagos, une préparation solide et une mise en œuvre opérationnelle efficace dans tous les États. Par ailleurs, nous devons encourager le développement du commerce numérique et du commerce électronique pour faciliter la circulation des biens et services. Une Afrique sans visa, grâce à l’émission du passeport de l’Union africaine (UA), serait également un pas décisif vers l’intégration continentale. Enfin, nous devons œuvrer au doublement du commerce intra-africain d’ici la prochaine décennie. Aujourd’hui encore, l’Afrique et l’Union africaine font face à des conflits (Soudan, RDC, instabilité en Libye, etc.). Ces guerres ne constituent-elles pas un frein à la ZLECAf et à l’intégration économique africaine ?
Effectivement, les guerres entravent l’intégration économique africaine. L’instabilité politique nuit à la paix et à la stabilité dans ces pays, qui sont des marchés potentiels. Elle affecte également la confiance des investisseurs, conduisant ainsi à leur retrait ou à leur réticence à s’engager économiquement dans ces zones. Par conséquent, l’absence d’investissements compromet l’intégration économique et réduit les bénéfices attendus de la mise en œuvre complète de la ZLECAf.
Le Ghana, pays historiquement panafricaniste sous l’impulsion de son premier président, Dr Kwame Nkrumah, comment analyse-t-il aujourd’hui, plus de 40 ans après, le « Plan d’action de Lagos» (1980) ?
Bien que le Ghana ait progressé dans plusieurs domaines, le pays n’a pas encore pleinement réalisé la vision du Plan d’action de Lagos, qui prônait l’autonomie économique comme levier de développement. Notre dépendance aux autres continents nous a rendus vulnérables aux déséquilibres commerciaux, aux fluctuations des prix et aux pressions liées aux emprunts extérieurs. Malgré ces défis, la ZLECAf représente une opportunité majeure pour transformer les économies africaines.
En guise de conclusion, quel message d’espoir le Ghana, pays d’Osagyefo Dr Kwame Nkrumah, adresse-t-il aux nations africaines, sept ans après le lancement de la ZLECAf au Rwanda ?
Lors de la création de l’OUA à Addis-Abeba en mai 1963, Osagyefo Dr Kwame Nkrumah déclarait : « Nous devons nous unir maintenant ou périr. » Aujourd’hui encore, en 2025, ces paroles résonnent avec force et pertinence. L’Afrique, à travers la ZLECAf et les initiatives de l’Agenda 2063, doit s’unir et s’appuyer sur ses propres forces pour assurer sa croissance économique et sa prospérité.